Peut-on imposer à un copropriétaire d’effectuer des travaux dans son appartement ?
Dans une copropriété chaque copropriétaire est libre et souverain quant à la réalisation de travaux qu’il fait exécuter dans son appartement.
- Il est libre du choix de la couleur des peintures et de celui de la plupart des équipements intérieurs.
- Ainsi les radiateurs comme les fenêtres sont-ils généralement considérées par les copropriétaires, voire par les règlements de copropriété comme des parties privatives à part entière.
Certes, l’usage les classe en partie privative, il en est de même des anciens règlements de copropriété. Aussi un copropriétaire a-t-il le droit de peindre ses radiateurs ou la face interne de ses fenêtres de la couleur de son choix sans demander l’avis de la copropriété.
En revanche,
- augmenter la puissance d’un radiateur ,
- faire installer un store extérieur ou remplacer ses volets en bois par des volets roulants électriques, suppose l’accord de la copropriété et le respect des exigences en vigueur.
- C’est pour cette raison que ce type de transformation exige que la demande en soit faite en Assemblée Générale avec production d’un dossier technique précis qui donnera lieu à un vote qui conditionnera la réalisation ultérieure des travaux projetés.
Reprenons l’exemple des radiateurs : dans un immeuble dont le chauffage est collectif,
- les radiateurs sont les équipements terminaux du réseau de chauffage, et à ce titre, ils font partie d’un équipement commun à la copropriété.
- Peut-on affirmer dès lors que ce sont des éléments privatifs ?
- Si l’on réfléchit sur le cas des fenêtres, qui sont communément considérées elles aussi comme des éléments privatifs, elles peuvent générer un inconfort thermique lorsque la qualité isolante de leur vitrage est insuffisante ou médiocre.
- Peuvent alors coexister dans un même immeuble des huisseries isolantes de belle qualité et des menuiseries anciennes à faible, voire très faible pouvoir isolant.
- Cette situation peut entraîner des disparités de niveau de chauffage importantes en faisant cohabiter des résidents dont l’appartement est mal équipé ou isolé au détriment d’autres copropriétaires dont l’appartement est correctement équipé.
- La consommation énergétique s’en trouve ainsi perturbée et déséquilibrée.
Longtemps on a considéré dans ces deux cas que l’on se trouvait en présence d’équipements privatifs et qu’il était dès lors impossible de remédier à ce type de situation, sauf à s’en remettre au bon vouloir et au sens civique des copropriétaires.
Les choses ont changé avec la loi dite Grenelle 2, n° 2010-788 du 12 juillet 2010 qui a introduit la notion de « travaux collectifs sur parties privatives » (art. 7), complétée par son décret d’application du 3 décembre 2012 :
En son article 7, la loi stipule que lorsque des économies d’énergie sont en jeu, et suite à l’élaboration du Diagnostic Technique Global ou d’un audit énergétique « le syndic inscrit à l'ordre du jour de l'assemblée générale des copropriétaires … la question d'un plan de travaux d'économies d'énergie ou d'un contrat de performance énergétique.………
Ces travaux peuvent comprendre des travaux d'intérêt collectif réalisés sur les parties privatives et aux frais du copropriétaire du lot concerné, sauf dans le cas où ce dernier est en mesure de produire la preuve de la réalisation de travaux équivalents dans les dix années précédentes.
Pour la réalisation des travaux d'intérêt collectif réalisés sur les parties privatives, le syndicat exerce les pouvoirs du maître d'ouvrage jusqu'à réception des travaux.» La réalisation de ces travaux est votée à la majorité de l’art. 25 de la loi du 10 juillet 1965
Le décret du 3 décembre 2012 précise quels sont les travaux touchés par la mesure. Il s’agit :
- de l’amélioration des fenêtres, vitrages et volets (ou autres systèmes d’occultation extérieurs)
- de la pose de robinets thermostatiques ou d’équipements d’équilibrages de radiateurs ou de panneaux de sols
- de la réalisation de l’équilibrage de ces équipements
- de la mise en place d’équipements de répartition de frais de chauffage ou de compteurs d’énergie thermique. (devenue obligatoire depuis pour toutes les copropriétés au terme de la Loi ELAN n° 2018-1021 du 23 novembre 2018)
Ces dispositions pour intéressantes qu’elles soient n’en posent pas moins quelques problèmes qui seront sans doute élucidés par la jurisprudence à venir :
1 - la possibilité pour un copropriétaire d’échapper à la réfection et modernisation générale s’il peut rapporter la preuve qu’il a lui même effectué des travaux à visée d’économie d’énergie (remplacement des fenêtres par exemple depuis moins de 10 ans)
2 - la maîtrise d’ouvrage et la réception finale des travaux confiées par la loi au syndicat des copropriétaires représenté par le syndic gestionnaire alors que c’est le copropriétaire bénéficiaire des travaux qui en assume la charge financière : qui choisit l’entreprise ? dans quels délais les travaux seront-ils effectués ?…